mardi , 1 avril 2025

Toulouse : Interview – Feu Chatterton, entre lumière et obscurité

La belle révélation de la scène musicale française, Feu Chatterton présentera ce jeudi à Toulouse leur magnifique premier album. Rencontre avec Clément pour évoquer ce brillant premier opus.

Feu Chatterton a dévoilé leur sublime et premier album, "Ici le jour ( a tout enseveli) ". Pendant que certains artistes se morfondent dans un pathos onirique embarrassant, que d'autre feignent d'ignorer les désespérances d'un siècle encore nouveau mais déjà usé, Feu! Chatterton nous offre ici une élégante collection de chansons hors du temps, réaliste et romantique jusqu'au vertige. Les voilà de passage à Toulouse, au Bikini, pour une nouvelle date. Rencontre avec Clément, guitariste et compositeur du groupe.


Voilà un an, que les toulousains vous ont découvert sur la scène du Bikini pour les Curiosités. Vous revenez avec votre premier album. Quel souvenir as tu de cette première date toulousaine ?
C'était un super moment, un des plus beaux moments de notre première tournée en décembre dernier. On arrivait à la fin de la première partie de nos concerts, après la sortie de notre EP. Avant ça, on faisait pas mal de bars, entre 100/200 places puis d'un coup, on arrive au Bikini et ses 1 500 places. Et, c'était rempli pour Moodoid surtout mais pour nous aussi. Quand on nous pose la question de savoir qu'elle est notre meilleure date, on évoque souvent le Bikini. En fait, ça se joue entre Toulouse et La Rochelle, pour le moment !

Vous êtes actuellement en tournée. On est dans quel état d'esprit ?
C'est un état d'esprit d'artisans en ce moment. On ne se rend pas compte de ce qui se passe autour de nous, on est dans notre bulle. On est des ouvriers du quotidien, on tourne, on roule en bus, on décharge notre matériel, on a la tête dans le guidon. On a toute la fatigue, l'usure mais aussi la joie de faire de la musique, d'échanger aussi avec le public. Mais actuellement, on pense aussi à Paris.

Tu dis « on pense aussi à Paris », comment avez vous vécu ce 13 novembre et les événements tragiques, ainsi que le chagrin qui en découle ?
Le 13 novembre dernier, on était sur scène à Saint Malo, ce fut un choc en apprenant la nouvelle en sortant de scène. Car on est humain, parisien, on a joué au Bataclan et on vit dans ces quartiers. On a eu des amis là bas aussi et ça touche le milieu de la musique . Quand tout se mélange, il y a un énorme chagrin. Pour l'instant, on a pas trop de recul, car c'est trop proche de nous. Il est difficile de faire de la scène dans le même état d'esprit qu' avant le 13 novembre dernier. Il y a quelque chose de brisé quand tu prends la scène.

Pour ceux qui ne savent pas qui est Feu Chatterton, comment est né le groupe ?
Ce fut fort simple en vérité. Arthur, Seb et moi, nous nous sommes rencontrés au début du Lycée. Personnellement, je jouais un peu de rock avec des potes, puis je me suis rapproché de Seb puis d'Arthur. Arthur nous balançait des textes qu'on mettait en musique. De fil en aiguille, on a avancé dans la même direction, même si au début, Arthur faisait du slam et nous une sorte de jazz. Puis il y a trois ans on s'est dirigé vers le son de Feu Chartterton. De là sont nées nos chansons, puis nous ont rejoint Antoine et Raph qui font désormais partie intégrante du projet.

L'envie de faire de la musique a toujours été là ?
C'est un peu délicat de répondre à ça, en fait. Car quand ça marche, il est plus simple de dire qu'on voulait faire de la musique. Pour moi, j'ai commencé à 11 ans par du piano et de la guitare, et je n'ai jamais arrêté de faire de la musique à côté de mes études. J'ai toujours su que la musique ferait partie intégrante de ma vie, elle serait toujours dans ma tête. Quand on a su qu'on pouvait ne faire que ça, c'est au moment où tout le monde voulait aller dans la même direction, avec la même ambition. On a su concrétiser ensemble la lueur des débuts et se jeter à fond dedans.

Entre les bons papiers dans la presse, une présence médiatique qui ne cesse de croitre, et un public de plus en plus nombreux, comment vivez vous cela ?
On est tellement dans une bulle, même quand on enchaîne la promo, qu'on n'arrive vraiment pas à se rendre compte. On est trop auto-centré par la tournée pour faire le point. Ce sont surtout les gens autour de nous qui nous renvoient cette image et qui nous disent ce qui se passe. Et puis, les choses se sont faites progressivement au final.

Vous avez mis un an entre l'EP et l'album mais au final 4 ans avec les débuts. Vous aimez prendre votre temps ?
Il y a eu le temps de l'adaptation avec un premier EP en septembre 2014. Un an pour un album, ce n'est pas si tard. Après depuis nos début, après 4 ans, il y a eu du temps. Mais le temps nécessaire pour faire des bars, pour tester nos musiques, pour se construire. C'est une carrière assez logique pour le moment. Pour faire l'album on a pris le temps nécessaire au final.

Comment se passe le processus créatif au sein du groupe ?
C'est vraiment aléatoire en fait ! On fait comme on peut (rires). Sur l'album, il y a 12 chansons, 12 façons de faire au final. On peut par exemple partir d'un bœuf puis Arthur pose quelques mots dessus puis complète par la suite. Sinon, un membre du groupe amène une maquette bien construire, et on a juste à la finaliser. Il n'y a pas de schéma. Après, en studio, on a aussi composé là bas, et d'autres chansons étaient déjà prêtes depuis un moment. Tout le monde a son mot à dire, chacun amène son truc, chacun prend sa place et prend part aux arrangements. C'est assez démocratique au final !

Comment définirais tu ce premier album ?
Bonne question ! Je dirais que c'est définitivement la continuité de nos quatre ans, car il y a de vielles chansons comme des récentes. C'est un album avec un paradoxe entre le clair et l'obscur. On commence aussi par Ophélie puis on finit par faire mourir une femme dans les Camélias. On a voulu transcrire le clair obscur de la peinture en musique. Il y a quelque chose de très cinématographique aussi dans notre musique.

Il y a un  côté cinématographique dans votre musique aussi bien dans les chansons que dans l'attitude assez théâtrale sur scène. C'est venu assez naturellement là aussi ?
Quand on écoute de la musique, on est très mental, un peu comme tout le monde je crois. Dans nos textes on raconte des histoires, on est dans une image mentale qu'on met en musique. Sur scène, il y a de ça aussi . Mais tout est naturel. Le côté théâtral d'Arthur est naturel aussi, notamment son costume trois pièces. Au final, on avait tous des instruments pour nous protéger, si on peut dire, lui a décidé d'enfiler un costume pour affronter la scène. C'est devenu son rituel. Puis, ses expressions, comme les nôtres, sont naturelles, on a les mêmes en répétition ou en studio.

Pour évoquer pleins de petites histoires, parfois liées à l'actualité comme dans Côte Concorde par exemple. Il y a un engagement personnel dans l'écriture ?
C'est surtout que écrire c'est un engagement. Après, on s'engage pas de façon directe. On ne dit pas frontalement les choses. Comme Côte Concorde par exemple. On est parti d'un fait divers pour raconter, dépeindre notre société contemporaine. Donc, il n'y a pas d'engagement frontal car il faut être bien muni pour ça. Et surtout il faut du recul et du temps. Par exemple pour Côte Concorde, on a pris énormément de temps. On cherche aussi et surtout à ne pas se limiter et à essayer de procurer le maximum de plaisir.

Quelques mots sur vos influences. Elles font parties de vous, ont-elles aidé à la construction de votre musique ?
On a forcement des influences qui ressortent c'est certain. Après, on a pas pris la musique de Radiohead pour mettre la voix de Bashung dessus. Mais les choses sont là, on les a digérées, et elles construisent notre musique forcément. On se sert de nos influences pour construire notre son. On ne singe pas !

A l'heure où de nombreux groupes utilisent l'anglais, il y a une sorte d'engagement de vouloir faire votre musique en français ?
Ce n'est pas un engagement de chanter en français. C'est encore une fois assez naturel pour nous. Arthur n'écrit qu'en français. Il ne pouvait pas en anglais alors que d'autres groupes le font. C'est assez viscéral et très sain comme écriture et comme choix artistique.

Vous faites partie d'une scène musicale française amenée par Lescop, Fauve, Aline ou encore la Femme. Que représente cette génération pour toi ?
Faut dire qu'elle est très bonne, et qu'on arrive au bon moment aussi. Pour Lescop, la Femme ou encore Fauve et Aline, ça marchait pour eux. Nous, en 2010, ils avaient ouvert la porte grâce à leur rock, leur pop en français. Et surtout, on s'est rendu compte qu'il y avait le public pour écouter ça. Puis, il y a eu le succès de Fauve, d'abord sur scène, et les médias se sont intéressés à eux et forcement à la scène qui en découle. Ce gros succès nous a aidé !

Actuellement, vous êtes en tournée. La suite vous dirige dans quelle direction ?
On doit continuer dans cette direction, continuer de tourner. On réfléchit déjà au deuxième album. On compose, on écrit. Ce n'est pas toujours évident en tournée, mais on y arrive au début avec la fraîcheur des premiers jours. Mais, encore une fois, on fait les choses naturellement, et là, c'est la scène !

FEU! CHATTERTON
MERCREDI 2 DÉCEMBRE 2015 ? 20H
LE BIKINI – TOULOUSE
Réservations :  05 62 73 44 77 – www.bleucitron.net

A voir aussi

Alex Burger : Country-rock et poésie décalée au Bijou !

Le mercredi 2 avril 2025 à 21h00, le Bijou accueille Alex Burger, un artiste country-rock …