Après 20 ans sur le devant de la scène, Arthur H continue son chemin avec un nouvel album « Baba Love » et un passage par Toulouse pour le festival Détours de Chant.
Arthur H est revenu avec un nouvel album « Baba Love » à l'Automne dernier : du rock de la nuit qui parle du cœur. Plus bavard que l'état amoureux annoncé dans ce titre, le chanteur revient sur ses moments de scène à la veille de son passage au Bikini pour le festival Détours de Chant à Toulouse.
Actuellement tu es en pleine tournée depuis la sortie de ton dernier album à l'automne dernier. Comment te sens-tu ?
Je me sens à ma place. J'ai un jeune groupe inconnu que je n'avais jamais rencontré avant. Cela procure beaucoup d'écoute. Cela fait du bien de sentir des oreilles neuves. Et puis, je vais au bout d'un fantasme de rock, genre rock-psyché-électro-transe. Avec des moments de pure poésie.
La scène te correspond bien…
J'essaye de me tenir très solidement sur scène car il y a beaucoup d'énergie dégagée lors d'un concert. Je m'accroche sérieusement pour ne pas m'envoler. J'essaye aussi d'avoir un côté un peu plus chaotique ; une violence douce correspondant à mon état d'esprit : très atmosphérique.
Cette présence scénique est aussi familiale, on le retrouve chez Jacques Higelin comme chez Izia…
C'est vrai que de ce côté là l'influence de Jacques est importante. Même un peu plus gentillet. Mais il y a une implication totale, du coup j'essaye de m'en rapprocher. Izia et moi avons été marqués par son talent. On est parfois assez costaud comme lui. Ça m’empêche pas de déconner. De faire de la variété dans le sens marrant.
Cela doit te donner de sacrés souvenirs scéniques ?
Ce qui est rigolo, quand tu es bien dedans, c'est que je n'ai aucun souvenir après. Je me souviens de la loge, de l'hôtel ou de rien du tout. Je suis connecté. Je m'abandonne. Je n'existe plus que par le son.
Au printemps, tu as sorti un nouvel album Baba Love. Que signifie ce titre ? C'est l'étonnement amoureux ?
Baba Love a un côté idiot, débile mental qui correspond dans le privé. Quand tu tombes amoureux il y a des balbutiements, des bégaiements : tu ne peux plus parler. Il y a des moments où ça arrive. C'est l’étonnement du désir amoureux. Et ça colle à l'envie de cette album.
C'est un album pour faire l'amour..
C'est vrai que c'est sa fonction basique. On peut s'en servir de bande son parfaite pour faire l'amour. Un peu prétentieux, mais c'est le truc ultime. Quand tu fais de la musique en étant sensuel, c'est ce que tu espères. J'essaye de m'en rapprocher.
Tu écoutes tes albums après leur sortie ?
Impossible de les écouter après, ou tellement de temps après. Je suis un peu schizo, parano avec ça. C'est obsédant et je ne peux pas m'écouter après, car ça ne m'appartient plus. J'entendrais tout les défauts dans une grande souffrance viscérale. Je peux entendre mes chansons deux ou trois ans après dans une fête, une radio, une épicerie.. Avec le recul, je trouve ça pas mal (rire).
Dans Baba Love, il y a plusieurs rencontres artistiques fortes. On pense notamment à Jean-Louis Trintignant. Comment s'est produite la rencontre ?
On a participé à un spectacle sur Boris Vian . Je l'avais d'abord entendu lire Apollinaire et j'ai été scotché par l'émotion, le rythme, la facture musicale… du coup, j'ai eu envie de faire quelque chose avec lui. C'est un grand artiste, dans le sens noble du terme. Il m'a décuplé mon goût pour la poésie sur scène. Je l'ai d'ailleurs invité pour un récital avec Nicolas Repac nommé l'Or Noir. C'est à dire un récital de poésie antillaise et caribéenne. C'est un truc très transe, un show métaphysique sensuel. On sort d'ailleurs un disque chez Naïve – petite promo.
Il y a aussi la rencontre avec l'excellent Saul Williams…
Quand j'ai écrit Baba Love, j'ai vu Gorillaz en concert. J'adore le mélange proposé dans leurs albums et sur scène notamment. C'est très mélodique. Je voulais composer avec des voix de rap, plus rentre dedans et très direct sur le titre Basquiat. L'évidence a voulu que ce soit Saul …
D'ailleurs dans Basquiat tu dis vouloir être plus productif. Tu l'es pourtant ?
Pas autant que j'aimerai. Basquiat peignait tout le temps parce qu'il savait peut être qu'il allait mourir jeune. Je ne me trouve pas assez créatif, peut-être parce que moi j'espère avoir le temps. ( rire)
Ça fait 20 ans que t'es sur le devant de la scène. Comment juges-tu l'évolution de la musique en France ?
Quelque part, en France, il y a très peu de critiques intéressantes. En général, je ne sais pas trop. Comme on est dedans, on est pas très objectif. Il y a des choses merveilleuses. D'autres très moyennes pour beaucoup. Il y a un climat en France de peur : entre un manque d'ambition et d'audace. On ne repousse pas les risques. On reste très frileux. Après, c'est un état d'esprit en général. Il faut mettre un peu de confiance là dedans.
Il y a aussi une génération entière qui chante en anglais. Toi qui manie les mots en français, cela te dérange ?
Quand c'est bien comme The Do et Izia, ça ne me dérange pas. Ils ont envie d'exprimer quelque chose qu'ils ne peuvent pas faire dans une autre langue. Ce qui me gène, c'est qu'on fasse tous style qu'on soit du Missouri. Il n'y a plus aucune variation. On a la même identité partout. Le même rock folk de base, mais très faible comparé à Cohen ou Dylan. Du coup, il y a une uniformisation. La référence unique est une vraie tragédie culturelle. J'aime le français. C'est une langue de révolte, caustique, survoltée, culturelle, vraiment géniale : c'est le rêve qu'on fait, le rythme intime de nos émotions. Ça fait partie de toi.
Tu débarques à Toulouse un nouvelle fois pour Détours de Chant. Quelle est ta relation avec cette ville ?
J'aime beaucoup Toulouse. J'aime le public très chaud, capable de tout. Il est très présent et n'a pas peur de s'amuser, de péter les plombs. Et puis, le Bikini est une institution rock…
Tu passes d'ailleurs une semaine après Izia. Comment s'est faite la rencontre artistique ?
Quand elle m'a invité sur son dernier concert de la tournée ! Nos voix marchent bien ensemble au delà de la génétique. Après ça, je voulais un duo classe et élégant. Izia était assez partante. En plus, nous sommes deux tziganes : les seuls moments où on a l'occasion d'être ensemble restent les moments de travail.
Comment vois-tu ton avenir ?
Artistiquement très coloré dans l'idéal. Commencer par une chanson qui marche, monter ma boite de distribution. Ouvrir encore plus mon rapport avec les gens, faire des disques, raconter des histoires, des livres…. bref, envahir le monde de mes productions créatives. Être enfin Basquiat.
L'état du disque est malheureusement en perdition…
Le système ne permet pas ça. Il n'y a pas assez de flux et il y a un vrai problème économique ; ça rapporte plus rien et coûte cher. Une équation économique impossible. Je souhaite beaucoup de courage aux jeunes musiciens car on leur laisse un champ de ruines avec quelques traces d'herbes tout de même.
Arthur H en concert à Toulouse
Mercredi 8 février au Bikini
Détour de Chant 2012, du 28 janvier au 11 février 2012
> Programme complet : http://www.detoursdechant.com/
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