Jeudi 3 décembre, Pascale Picard présentera son troisième album, "All Things Pass" au Metronum de Toulouse. Rencontre avec la québecoise après six années d'absence en Europe.
Il y a 6 ans, la France et le Canada découvraient un petit bout de femme qui allait marquer la scène pop rock : PASCALE PICARD sortait “Me Myself & Us”, un disque qui se vendit à 300000 exemplaires dont 150 000 en France. Une tournée marathon et deux Olympia s’ensuivirent. Et puis ? Et puis le problème du succès qui, s’il ne change pas (toujours) l’artiste, change (souvent) les ambitions de son équipe. Des différents artistiques forts avec son ancien label – qui la voyait s’inscrire dans une démarche plus grand public – sont nés. On lui voulait des orchestrations dans lesquelles elle ne se reconnaissait pas, or quand on est une artiste de caractère, intègre, ça ne passe pas toujours. Le disque n’est donc tout simplement pas sorti en France. Même si ce ne fut pas simple à accepter, Pascale Picard a tracé sa route. En 2012, la réalisatrice d’une série TV canadienne lui propose de chanter une dizaine de standards en guitare voix pour sa BO: Johnny Cash, Bob Dylan, Simon & Garfunkel, The Rolling Stones etc…
Un retour aux sources, à la simplicité, dans lequel elle s’est retrouvée et qui a nourri l’écriture de son 3ème album. Les titres comme “Runaway”, certainement son plus grand tube, ou encore “Hey Tim” sont là pour en attester. Pascale Picard est de retour avec de grands titres et nous prouve qu’elle est définitivement une fabuleuse songwritter. Rencontre avec Pascale Picard avant son passage toulousain.
Vous êtes en France pour de nouvelles dates après une longue période sans concert dans notre pays. Ce ne fut pas trop long ?
Tellement long en effet ! Six ans sans revenir en Europe, mais ce n'est pas pour autant que je n'ai ni cessé de penser à revenir ni arrêté de bosser. J'ai sorti un second album qui n'a pas vu le jour outre-Atlantique. Donc pas d'album, pas de concert. Mais, on reste très lié à la France grâce aux réseaux sociaux notamment, mais revenir, c'était une attente interminable pour nous.
La France vous a donc manqué ?
Oh oui, la France nous a manqué énormément. On est très chanceux, car le public est très fidèle. Aujourd'hui, nous n'avons pas le même accueil qu'à notre première venue. A l'époque, on passait partout à la radio, maintenant faut reconquérir le public avec un nouvel album et on est beaucoup moins attendu. J'étais prête à tout pour revenir, réessayer de jouer ici, voir ce que ça donne. Là, ça va au delà de mes attentes. Bref, coucou on est là !
Outre le fait de revenir en France pour une tournée, le troisième opus sonne comme une sorte de renouveau, est-ce le cas ?
Pour moi, c'est un nouveau départ. Le fait de ne pas sortir de deuxième album ici donne cette réelle sensation. Avant aussi nous avions une maison de disque, là on est indépendant, malgré ce nouveau départ on reste dans une certaine continuation. Le déclic profond fut le travail effectué sur la série Trauma où je fais des reprises guitare-voix. Il y avait dès lors un cheminement logique me conduisant à un retour aux sources. Donc je suis repartie du duo guitare-voix, tiens ça donne quelque chose, maintenant je peux rajouter des instruments.
Le second album a marqué selon toi une vraie différence avec le premier, ce pourquoi il n'est pas sorti ici ?
Pour le second opus, on sortait d'un succès pop, on voulait prouver quelque chose en faisant un album plus léché. Prouver, en quelque sorte, qu'on était plus qu'un succès radio. On voulait en mettre plein la vue. Il était moins respirable, mais j'en reste fière ! Là le nouveau projet, alors que le précédent éclipsait un peu ce que nous sommes, est plus dans l'ordre des choses. On fait de la recherche musicale mais plus à n'importe quel prix.
A l'écoute de l'album, on sent de nombreuses influences. C'est une quête nouvelle pour toi ? Un besoin ?
On fait les chansons les unes après les autres. Musicalement, j'aime tout, du Hip Hop au rock, à la pop au punk…On cherche donc dans nos influences ce qui correspondrait le mieux à chaque titre. Dis toi que pour chaque morceaux on a 7/8 versions différentes allant de la chanson au métal pour enfin trouver le bon.
Et dans cette quête, tu as le dernier mot ou c'est le groupe ?
C'est moi qui ai le dernier mot, mais le choix des versions fut évident à chaque fois. On travaille ensemble depuis si longtemps, on utilise jamais le vote par exemple. Tout se fait assez naturellement.
D'ailleurs, dans quel album, quelle serait la chanson la plus représentative ?
Il y en a plusieurs. Ça change selon les moments (rires). Celle qui correspond le mieux, selon moi, la plus représentative, c'est Runaway. A l'instant je suis fière de cette richesse de mots qu'on y retrouve. C'est une chanson difficile à composer car très chirurgicale. Quand je l’eus finie, j'en étais très fière ! Ensuite, dans ce quelle représente, je suis contente de Haunted State. Elle est assez singulière, mettant la voix en valeur et j'ai beaucoup de choses à dire là dessus.
Comment naissent tes chansons ? Y a-t il des choses que tu n'arrives pas à mettre en chanson ?
Je peux parler exactement de tout. Beaucoup viennent de ce que j'observe dans les relations entre les individus. Je suis très appelée par le côté psychologique des choses. Je ne fais par ailleurs pas de chansons, dites engagées ou politiques. Car j'estime qu'il faut connaître parfaitement le sujet, et pour moi, c'est l'émotion qui domine dans mon écriture.
L'album possède un côté introspectif notamment grâce à ta voix plus douce. Y a t-il eu un travail de ce côté là ?
J’apprends ! La voix évolue, avec l'âge et peut être aussi par le fait que j'ai arrêté de fumer (rires). Il y a une gamme plus grande dans l'utilisation de ma voix, mais je crie moins aussi. Je pense qu'on est dans la continuité de mon travail sur Trauma.
Ta langue maternelle est le français. L'an dernier, tu as donné un concert de tes chansons dans ta langue. Pourquoi ce concert ? Et pourquoi choisir l'anglais ?
J'ai toujours aimé chanter en français, mais il y a quelque chose de l'ordre de la peur. Je ne pense pas ma musique en français, l'anglais est naturel au final. Mais, c'est vrai que j'ai pu chanter dans ma langue aux Francos l'an dernier. Ils m'ont appelé me demandant si je pouvais, et voulais, pour eux uniquement, adapter mes chansons en français. J'ai répondu positivement à la demande et j'ai fait appel à une amie française, Gaelle, qui vit chez nous, pour adapter les chansons. J'ai d'abord traduit textuellement avant que Gaelle ne les enrobe de sa grâce. Ce fut un grand moment, un beau souvenir qui me donne envie de chanter en français. Mais je pense que si un jour je dois écrire en français, faut que ça vienne uniquement de moi. Au Québec, on m'a souvent reproché le choix de l'anglais car on est très attaché à ce patrimoine linguistique. Mais j'ai assumé et j'ai continué la dedans. Je me dois d'être intègre au moment présent.
Parlons aussi de cette pochette. On y voit ton tatouage, une ancre marine sur le bras. Est-ce un message particulier ?
J'ai juste choisi la meilleure photo. Ce tatouage a bien 10ans, il fait entièrement partie de ma personnalité, mais je ne vais pas t'expliquer les raisons, même si elles sont importantes, car elles sont plus belles dans ma tête que quand je les dis.
Enfin, que te souhaiter pour la suite ?
Faire de mon mieux, continuer de tourner et aller à la rencontre des publics. Tu peux pas savoir comment ça m'a manqué !